Le plan d’actions européen FLEGT (Forest Law Enforcement, Governance and Trade) datant de 2003 prévoit différentes mesures afin d’exclure le bois d’origine illégale du marché européen. Ces mesures visent l’amélioration de l’approvisionnement en bois issu de récoltes légales et l’augmentation de la demande de bois légaux. Les deux piliers de ce plan d’action sont le règlement sur le bois et les accords de partenariats volontaires, à savoir des accords commerciaux conclus entre les pays exportateurs de bois permettant de sécuriser une offre de bois issus d’une récolte légale.

Le Règlement n°995/2010 du Parlement et du Conseil Européen du 20 octobre 2010, dit Règlement Bois de l’Union Européenne (RBUE), établit les obligations des opérateurs responsables de la mise sur le marché de bois ou de produits dérivés. Il est entré en vigueur le 3 mars 2013.

Le Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt (MAFF) a été désigné, par la circulaire DGPAAT/SDFB/C2013-3029 du 14 mars 2013, comme l’autorité responsable de la mise en vigueur en France du RBUE. Le MAFF assure ainsi le contrôle du suivi du RBUE par les entreprises d’exploitation forestière et les scieries importatrices de bois. Le Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie (MEDDE) est quant à lui chargé d’assurer le contrôle du reste des opérateurs pour la première mise sur le marché européen de bois ou de produits dérivés.


I. Champ d’application


Il n’existe pas de définition internationale du bois illégal. Le RBUE le définit comme tout bois récolté en violation des dispositions légales dans le pays de récolte. Ces dispositions légales sont relatives au périmètre de récolte, au paiement des droits de récolte, à la législation environnementale et forestière, au commerce et aux douanes ainsi qu’aux droits des tiers relatifs à l’usage et à la propriété du bois récolté. Le RBUE prévoit que seuls les bois et les produits dérivés du bois détenteurs d’une autorisation FLEGT ou un permis CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction) répondent à ces exigences légales.

Les produits concernés par le règlement sont listés dans l’annexe 1 du RBUE (1). Y sont présents tous les produits à base de bois, à l’exception des produits d’édition, tels que les livres, les journaux ou les magazines) et certains produits pour lesquels il n’existe pas de code douanier spécifique, tels que les jouets en bois.

Les opérateurs concernés par les obligations du RBUE sont ceux qui importent du bois ou des produits dérivés provenant de pays extérieurs à l’Union Européenne et ceux qui exploitent du bois sur le territoire européen.

Les opérateurs concernés par le contrôle du MEDDE sont ceux qui effectuent du commerce de bois et de produits de bois en gros ou des opérations de fabrication (meubles, cartonnages, parements, placage en bois, charpentes, emballages et palettes). La vente de détail de meubles est également incluse. Sont cependant exclus de ce contrôle les exploitants forestiers et les industries de première transformation.


II. Obligations


Le RBUE a mis en place un système de diligence raisonnée. Il s’agit d’une démarche de vigilance pesant sur les opérateurs mettant en premier sur le marché européen du bois ou des produits dérivés. Ce système doit être mis en place lors de l’importation en provenance d’un pays extérieur à l’Union Européenne de bois bruts ou transformés et de produits dérivés du bois, ainsi que lors de l’exploitation de bois dans une forêt sur le territoire de l’Union. Il peut être appliqué une fois par an à chaque produit mis sur le marché, si les caractéristiques restent constantes. Les opérateurs sont libres d’utiliser leur propre système ou d’avoir recours à une organisation de contrôle reconnue par la Commission Européenne. L’annexe 2 du RBUE présente un exemple de système de diligence raisonnée.

Les opérateurs doivent ainsi mettre en place une procédure permettant d’éviter de mettre sur le marché des bois issus d’une récolte illégale. Il s’agit d’une procédure en trois étapes, à savoir :

1. Collecter des informations sur le bois ou le produit dérivé : l’opérateur doit récolter toutes les informations obligatoires sur le produit, à savoir les essences de bois présentes, le pays de récolte voire la région et/ou la concession si le risque est élevé, la quantité de bois ainsi que tous les documents permettant d’attester la légalité du produit.

2. Évaluer le risque d’une provenance illégale : l’opérateur doit confronter les informations obtenues avec les critères de risque prévus par l’article 6 du RBUE. Pour ce faire l’opérateur doit répondre à certaines questions (par exemple : Tous les maillons de la chaîne sont-ils identifiés ? Est ce que l’essence de bois est particulièrement sujette à l’exploitation illégale?) et si la réponse à l’une d’elle soulève une inquiétude, le risque ne peut être considéré comme négligeable.

3. Mettre en œuvre des mesures proportionnées d’atténuation du risque si cela s’avère nécessaire : pour les risques faibles, l’opérateur peut simplement demander des informations manquantes au fournisseur. Pour les risques forts, un audit de la chaîne d’approvisionnement ou une certification sont envisageables. Cependant s’ils ne sont pas réalisables, l’opérateur devra changer de fournisseur ou de pays de récolte.


Les opérateurs ont également une obligation quinquennale de conservation dans les registres des informations ainsi recueillies et des mesures prises. Ces documents peuvent servir de preuve de l’utilisation d’un système de diligence raisonnée en cas de contrôle. Ils doivent également évaluer de façon régulière leur système et le maintenir à jour.


III. Contrôle


Les contrôles visent à vérifier que les opérateurs concernés utilisent bien un système de diligence raisonnée, conforme aux exigences du règlement, lors de la mise sur le marché. Les contrôles pour lesquels le MEDDE est compétent sont réalisés par des inspecteurs de l’environnement (L. 172-1 Code de l’environnement).

Les opérateurs doivent être prévenus par courrier du contrôle à venir, sauf si le caractère inopiné du contrôle s’impose pour éviter la dissimulation d’infractions. Le courrier invite également l’opérateur à transmettre la procédure d’évaluation du risque ainsi qu’une copie des registres obligatoires à l’inspecteur. Une visite sur place est ensuite effectuée afin de vérifier l’application matérielle du système de diligence raisonnée. Cette visite a également lieu si les documents n’ont pas été transmis ou de façon incomplète. L’inspecteur peut accéder aux bâtiments entre 8h et 20h et, en dehors de ces heures, lorsqu’ils sont ouverts au public ou qu’une activité de production, de fabrication, de transformation, d’utilisation, de conditionnement, de stockage, de dépôt, de transport ou de commercialisation est en cours. L’opérateur doit être présent lors de cette visite et permettre l’accès aux locaux ainsi qu’aux documents à l’inspecteur. En dehors des heures précitées ou en cas d’opposition de l’opérateur, le juge des libertés et de la détention peut autoriser cette visite.

Le contrôle porte sur quatre points principaux. Le premier est la vérification du système de diligence raisonnée qui doit contenir une description écrite de la procédure d’évaluation du risque et de son application. Le deuxième est l’évaluation de la procédure d’atténuation des risques non négligeables et des mesures prises par l’entreprise. Le troisième porte sur la consultation des registres préalablement mentionnés. Pour évaluer ces trois points, l’inspecteur va choisir deux produits, provenant de pays à risque, dans les registres et regarder comment la procédure a été mise en œuvre. Enfin, le quatrième point porte sur la vérification physique des bois et produits dérivés présents sur le site. Il faut que les lots, choisis de façon aléatoire, soient répertoriés dans les registres de diligence raisonnée.

IV. Sanctions

1) Les sanctions administratives

A l’issue du contrôle, en cas de non-conformité, un rapport de manquement administratif est rédigé. Il précise la situation juridique applicable et opposable à l’opérateur contrôlé, retrace l’ensemble des contrôles préalablement effectués, mentionne les non-conformités constatées et propose les suites à donner. Ce rapport est envoyé à l’autorité administrative compétente, à savoir le préfet de Région du lieu de constatation des manquements.

Le préfet met ensuite l’opérateur en demeure de régulariser sa situation par arrêté préfectoral. Il ne dispose pas à cet effet d’un contrôle d’opportunité. La mise en demeure peut porter sur la nécessité de formuler par écrit la procédure d’évaluation du risque, sur le caractère incomplet de cette procédure au regard des critères nécessaires, sur l’application de mesures d’atténuation adaptées au risque ou encore sur le manque d’informations sur les produits. Le délai de mise en conformité, mentionné par la mise en demeure, ne peut excéder un mois. A là fin de ce délai, si les manquements persistent, le préfet peut prendre des mesures de police ou des sanctions administratives. Il doit alors informer l’opérateur des mesures et sanctions envisagées et lui laisser un délai permettant de présenter des observations.

Le préfet peut ainsi suspendre le fonctionnement de l’entreprise ou de l’activité à l’origine du manquement et ordonner le paiement d’une amende, d’un montant maximum de 15 000 euros. Si des travaux sont nécessaires, la somme correspondante peut être consignée et ces derniers peuvent être réalisés d’office en lieu et place de l’opérateur. Le préfet peut également prononcer une astreinte journalière d’un montant maximum de 1 500€ jusqu’à la mise en conformité (L. 171-7 et 171-8 Code de l’environnement).

2) Les sanctions judiciaires

Les délits observés lors du contrôle font l’objet d’un procès verbal d’infraction, reprenant les éléments de la procédure, transmis dans les cinq jours au procureur de la République. Une copie de ce document est adressée au préfet (L. 161-12 Code forestier et L. 171-16 Code de l’environnement). Le procès verbal n’a pas à être transmis à l’opérateur mis en cause. Le procureur de la République décide alors des suites à donner à l’infraction ainsi constatée.



(1) Annexe 1 : Bois et produits dérivés ciblés par le RBUE

• 4401 Bois de chauffage en rondins, bûches, ramilles, fagots ou sous formes similaires; bois en plaquettes ou en particules; sciures, déchets et débris de bois, même agglomérés sous forme de bûches, briquettes, boulettes ou sous formes similaires
• 4403 Bois bruts, même écorcés, désaubiérés ou équarris
• 4406 Traverses en bois pour voies ferrées ou similaires
• 4407 Bois sciés ou dédossés longitudinalement, tranchés ou déroulés, même rabotés, poncés ou collés par assemblage en bout, d’une épaisseur excédant 6 mm
• 4408 Feuilles pour placage (y compris celles obtenues par tranchage de bois stratifié), feuilles pour contreplaqués ou pour autres bois stratifiés similaires et autres bois sciés longitudinalement, tranchés ou déroulés, même rabotés, poncés, assemblés bord à bord ou en bout, d’une épaisseur n’excédant pas 6 mm
• 4409 Bois (y compris les lames et frises à parquet, non assemblées) profilés (languetés, rainés, bouvetés, feuillurés, chanfreinés, joints en V, moulurés, arrondis ou similaires) tout au long d’une ou de plusieurs rives, faces ou bouts, même rabotés, poncés ou collés par assemblage en bout
• 4410 Panneaux de particules, panneaux dits «oriented strand board» (OSB) et panneaux similaires (par exemple «waferboards»), en bois ou en autres matières ligneuses, même agglomérés avec des résines ou d’autres liants organiques
• 4411 Panneaux de fibres de bois ou d’autres matières ligneuses, même agglomérées avec des résines ou d’autres liants organiques
• 4412 Bois contreplaqués, bois plaqués et bois stratifiés similaires
• 4413 00 00 Bois dits «densifiés», en blocs, planches, lames ou profilés
• 4414 00 Cadres en bois pour tableaux, photographies, miroirs ou objets similaires
• 4415 Caisses, caissettes, cageots, cylindres et emballages similaires, en bois; tambours (tourets) pour câbles, en bois; palettes simples, palettes-caisses et autres plateaux de chargement, en bois; rehausses de palettes en bois (pas les matériaux d’emballage, utilisés exclusivement comme matériaux d’emballage pour soutenir, protéger ou porter un autre produit mis sur le marché)
• 4416 00 00 Futailles, cuves, baquets et autres ouvrages de tonnellerie et leurs parties, en bois, y compris les merrains
• 4418 Ouvrages de menuiserie et pièces de charpente pour construction, y compris les panneaux cellulaires, les panneaux assemblés pour revêtement de sol et les bardeaux (shingles et shakes), en bois
• Pâte et papier des chapitres 47 et 48 de la nomenclature combinée, à l’exception des produits à base de bambou et produits de récupération (déchets et rebuts)
• 9403 30, 9403 40, 9403 50 00, 9403 60 et 9403 90 30 Meubles en bois
• 9406 00 20 Constructions préfabriquées


Sources:
- Circulaire DGPAAT/SDBF/C2013-3029 du 14 mars 2013
- Instruction Technique DGPAAT/SDFB/2014-992