
Le groupement d'intérêt économique et environnemental (GIEE) pour une agriculture de meilleure qualité.
Par Anna Koenen
Posté le: 28/12/2014 18:42
Dans le cadre de sa démarche de développement d'une agriculture française de qualité accrue sur les plans économiques, sociaux et environnementaux, le gouvernement français a promulgué, le 13 octobre 2014, un décret mettant en place un outil concret de l'article 3 de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 18 décembre 2012 : le groupement d'intérêt économique et environnemental (GIEE). Le groupement d'intérêt économique et environnemental, permet selon la définition du gouvernement(1) : « d'accompagner et de valoriser les agriculteurs qui s'engagent collectivement à mettre en œuvre un projet de modification ou de consolidation durable des pratiques qu'ils emploient pour la gestion de leurs systèmes de production, en visant une performance à la fois économique, environnementale et sociale ». L'objectif de la mesure est de prioriser les démarches de production collectives et locales et de développer la performance qualitative et quantitative agricole française, notamment par l'intermédiaire de majorations ou d'attribution préférentielle des aides.
Le décret précise les conditions d'encadrement de ce GIE. En premier lieu, le groupe droit avoir une personnalité morale. Un groupe d'agriculteurs souhaitant se réunir pour former un collectif peut, par exemple, se constituer en une association. L'initiative peut venir de plusieurs exploitants, cependant ils doivent former un projet cohérent par rapport aux objectifs environnementaux, sociaux et économiques de la loi mais aussi, « en cohérence avec les projets et [enjeux] territoriaux de développement local existants »(2). Des agriculteurs aux terrains mitoyens pourront ainsi se réunir pour réduire l'utilisation et le coût de leur énergie en la mettant en commun, réduire l'utilisation d'engrais et de pesticides et pérenniser ou parfois même retrouver la fertilité de la terre en favorisant une culture de rotation.
Si le projet semble bienvenue compte tenue des enjeux agricoles, économiques et environnementaux actuels, certains points du décret mènent à s'interroger sur la sempiternelle difficulté entre les enjeux économiques et environnementaux, qui sont aussi liés qu'ils peuvent facilement entrer en conflits. Le décret déclare en effet que le Groupement d'Intérêt Économique et Environnemental doit préciser les moyens mis en œuvre pour les actions, c'est à dire soit « a) les mesures d'accompagnement mises en place pour la réalisation du projet ; b) Le cas échéant, les partenariats noués par le groupement avec, notamment, les acteurs des filières et des territoires, et leur contribution à la réalisation des objectifs poursuivis ; ». On peut se demander quelles types de mesures d'accompagnement sont nécessaires à la réalisation du projet en sachant que « leur présentation distingue celles qui relèvent de l'appui à l'action collective et au pilotage du projet et celles qui relèvent de l'accompagnement technique pour l'évolution des pratiques agricoles »(3) et sachant que le paragraphe suivant prévoit l'obligation, le cas échéant, de créer des partenariats avec des acteurs des filières et des territoires. Si les autres filières sont les industriels ou les distributeurs, le nécessaire enjeu économique peut s'avérer être une aide aussi bien qu'un obstacle au développement du projet environnemental pour celui dont le pouvoir économique est le plus faible. Un industriel n'a en effet pas toujours la même empreinte environnementale qu'un agriculteur. Cette nécessaire coopération peut s'avérer complexe pour engager un projet d'une telle ampleur autant qu'elle peut permettre d'assurer la pérennisation de celui-ci en y engageant une majorité d'acteurs de filières différentes. Reste aussi à savoir ce qu'entend la loi par performance environnementale.
Enfin, la mesure a un volet social puisque elle vise à améliorer les conditions de travail, l'emploi et à lutter contre l'isolement en milieu rural.
Pour être reconnu comme Groupement d'Intérêt Économique et Environnemental il faut déposer un dossier à la Direction régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt (DRAAF) qui donnera une instruction à la suite de laquelle une formation spécialisée et présidée par la Direction régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt et le président du conseil régional sera créée pour examiner le projet à son tour. La Commission, appelée Commission Régionale de l’Économie Agricole et du Monde Rural (COREAMR) devra avoir une composition représentative de la diversité des acteurs existants, c'est à dire les agriculteurs et professions de l'aval comme les industriels et les distributeurs, les organisations et instituts de défense de l'environnement et des consommateurs, les acteurs publics.
Si la Commission Régionale de l’Économie Agricole et du Monde Rural (COREAMR) accepte de reconnaître la qualité de Groupement d'Intérêt Économique et Environnemental au groupe candidat, le préfet de région signera l'avis de reconnaissance.
Les premiers Groupements d'Intérêt Économique et Environnemental pourront voir le jour dans l'année 2015.
1, 2, 3 Groupement d'intérêt économique et environnemental. [en ligne]. Disponible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029574630&categorieLien=id (page consultée le 28 décembre 2014)