
L'encadrement institutionnel de la présence de médicaments dans l'environnement (Partie 2)
Par Clarisse DESCROIX
Posté le: 30/07/2014 18:24
Au niveau national, la problématique santé/environnement est encadrée par des organismes pilotes (A), des institutions de police et de sécurité sanitaire (B) ainsi que des organismes d'expertise (C). Ils des missions globales ou décentralisées à l'échelle territoriale.
A. Les organismes pilote
- Le ministère chargé de la santé
- Les autres ministères et directions générales exerçant des prérogatives de santé environnementale : le Ministère de l’environnement concoure notamment à la mise en œuvre des mesures destinées à protéger la santé humaine. La direction générale de la prévention des risques, de l’aménagement, du logement et de la nature sont investies de missions de police sanitaire. Ministère de l’Agriculture et sa direction générale de l’alimentation (DGAL), la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ministère de l’économie). Enfin, la direction générale de la santé participe aux actions de prévention, de surveillance et de gestion des risques sanitaires liés à l’environnement.
- Les Comité économique des produits de santé
- Les Agences régionales de santé
- Les communes
- Les départements. Leur action est mise en œuvre par des commissions, conseils et directions. Nous pouvons citer la Commission départementale compétente en matière d’environnement, de risques sanitaires et technologiques, ou encore le Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques ainsi que la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS).
- Les régions
- Les réseaux de santé
A cela il faut ajouter de nombreux organismes consultatifs administratifs et d'éthique.
B. Les institutions de police et de sécurité sanitaire
C’est après l’affaire du sang contaminé qu’a eu lieu la prise de conscience de la nécessité d’une institution compétente en matière de sécurité sanitaire. C’est à ce moment qu’a été créée une agence du médicament . La loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire lui substitue l’Agence Française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), finalement transformée en Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dont la compétence englobe et dépasse très largement les médicaments. Ceux-ci n’en conservent pas moins un régime particulier qui les distingue des autres produits de santé.
1. L'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM)
L'ANSM est un établissement public de l’Etat placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, régi par les dispositions figurant aux articles L. 5311-1 à L. 5323-5 et R. 793-1 à R. 793-26 du Code de la santé publique.
La loi du 29 décembre 2011 l’a substituée à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) à la suite de l’affaire du Médiator.
L’objectif principal de l’Agence est de garantir la sécurité sanitaire des produits à finalité sanitaire destinés à l’homme ainsi que des produits cosmétiques et de tatouage. La sécurité sanitaire des médicaments fait donc partie de son champ de compétences.
L’Agence participe à l’application des lois et des règlements pour les produits relevant de ses compétences. Elle procède à l’évaluation des bénéfices et des risques liés à l’utilisation de ces produits. Elle est également investie d’une mission d’alerte sanitaire en cas de risque pour la santé publique. Ainsi elle peut prendre ou demander aux autorités compétentes de prendre des mesures de police sanitaire nécessaires lorsque la santé de la population est menacée.
Ses trois fonctions principales sont l’évaluation, l’inspection et le contrôle, auxquelles Il faut ajouter une mission d’information du public par le biais notamment de rapports de synthèse de l’évaluation effectuée pour tout nouveau médicament ainsi que les décisions d’octroi, suspension ou retrait d’autorisation de mise sur le marché.
L’agence dispose de pouvoirs de police sanitaire très étendus. Ils sont énoncés aux articles L. 5312-1 à -4 du Code de la santé publique. Elle peut, en cas de danger ou de suspicion de danger pour la santé humaine ou pour la santé publique suspendre ou interdire des activités relatives à un produit de santé. Elle peut également ordonner la diffusion de mises en garde, et, depuis la loi du 29 décembre 2011, elle peut prononcer des amendes administratives qui peuvent être assorties d’astreinte journalière en cas de manquement aux règles applicables aux produits de santé.
L’ANSM dispose également d’une inspection qui exerce son pouvoir de contrôle sur les entreprises exploitant des produits de santé (laboratoires pharmaceutiques et pharmacies).
L'encadrement de l'ANSM :
Depuis la loi du 4 janvier 1993 relative à la sécurité en matière de transfusion sanguine et de médicaments, les compétences de police du médicament ont été transférées du ministre de la santé au directeur général de l’agence.
Ce transfert de compétences est énoncé à l’article L. 5322-2 du CSP : le directeur général de l’agence prend « au nom de l’Etat » les décisions relatives aux produits de santé qui relèvent de la compétence de l’agence en vertu du code de la santé publique. Ces décisions ne sont susceptibles d’aucun recours hiérarchique, sauf par le ministre chargé de la santé en cas de menace grave pour la santé publique.
Le Conseil d’Etat a affirmé en 2003 que les décisions de suspension de produits n’ont pas de caractère réglementaire (2). Toutefois, depuis une ordonnance du 1er septembre 2005 (3), de nombreuses dispositions réglementaires sont prises par décision de l’ANSM.
L’agence est administrée par un conseil d’administration, composé de représentants de l’Etat, de trois députés et de trois sénateurs, de représentants des régimes obligatoires d’assurance-maladie, de représentants des professionnels de santé, de représentants du personnel de l’agence et de personnalités qualifiées.
2. L'agence nationale du médicament vétérinaire
Il s’agit d’un service sans personnalité juridique constitué au sein de l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Elle est placée sous la tutelle conjointe des ministres de l’Agriculture et de la Santé. L’ANSES exerce au titre de l’Agence nationale du médicament vétérinaire et au nom de l’Etat les pouvoirs de police sanitaire en matière de médicaments vétérinaires. Elle délivre, suspend ou retire les autorisations de mise sur le marché des médicaments vétérinaires et est chargée de la vigilance sanitaire en la matière. Pour ce faire elle dispose de services d’inspection. Elle est habilitée, à l’instar de l’ANSM, depuis l’ordonnance du 1er septembre 2005 à prendre par « décision » des dispositions réglementaires pour fixer notamment les bonnes pratiques de laboratoire ou les bonnes pratiques de fabrication applicables au médicament vétérinaire.
C. Les organismes d'expertise
1. La Haute Autorité de Santé (HAS)
La Haute Autorité de Santé est une autorité publique indépendante qui contribue à la régulation du système de santé par la qualité. Pour ce faire, elle évalue d’un point de vue médical et économique les produits de santé, les pratiques professionnelles et l’organisation des soins et de la santé publique.
2. L'institut de veille sanitaire (InVS)
L’InVS est un établissement public placé sous la tutelle du ministère chargé de la Santé. Il exerce des missions de surveillance et d’observation permanents de l’état de santé de la population, de vigilance et d’alerte dans tous les domaines de la santé publique ainsi que de participation à la gestion des situations de crise sanitaire.
3. L'agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES)
Créée par une ordonnance du 7 janvier 2010 et un décret du 28 juin 2010 l’Agence un établissement public de l’Etat à caractère administratif. Elle est le résultat d’une fusion entre l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments et l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, fusion décidée par la loi HPST de 2009 (art 115).
L’agence est administrée par un conseil d’administration composé de plusieurs collèges dont un comporte des représentants d’associations agréées de protection de l’environnement.
La mission principale de l’agence est énoncée à l’article L. 1313-1 du Code de la santé publique. Il s’agit d’assurer la sécurité sanitaire humaine dans les domaines de l’environnement, du travail et de l’alimentation. Elle contribue également à la protection de la santé et du bien-être des animaux, à la protection de la santé des végétaux et à l’évaluation des propriétés nutritionnelles et fonctionnelles des aliments. Elle exerce également les missions relatives aux médicaments vétérinaires dans le cadre de l’Agence nationale du médicament vétérinaire (voir supra).
C’est l’ANSES qui réalise l’évaluation des risques et fourni aux autorités publiques des informations sur ces risques ainsi que l’expertise et l’appui scientifique et technique nécessaires à l’élaboration des dispositions législatives et réglementaires et à la mise en œuvre des mesures de gestion des risques. Elle peut dans cette optique être saisie par les associations de protection de l’environnement agréées. Elle peut également s’autosaisir.
L’Agence dispose également d’une mission de veille, de vigilance et de référence. Elle a compétence pour proposer aux autorités sanitaires « toute mesure de nature à préserver la santé publique » et en cas de menace de danger grave, elle « recommande les mesures de police sanitaire nécessaire ».
Enfin, l’Agence bénéficie d’un pouvoir de proposition et d’avis. Elle peut se saisir ou être saisie notamment par des associations de consommateurs, de défense de l’environnement, d’usagers du système de santé de toute question entrant dans ses compétences.
Les avis et recommandations de l’agence sont rendus publics sous réserve des secrets protégés par la loi. L’agence peut accéder, dans des conditions préservant la confidentialité des données à l’égard des tiers, aux informations nécessaires à l’exercice de ses missions détenues par toutes personne physique ou morale sans que puisse lui être opposé le secret médical, le secret professionnel ou le secret en matière industrielle ou commerciale .
L’action de ces différentes institutions est mise en œuvre notamment par l’élaboration de plans gouvernementaux. C’est le cas par exemple du Plan national de prévention des risques pour la santé liés à l’environnement, établi tous les cinq ans et régi par l’article L. 1311-6 du Code de la santé publique. Il est conçu pour prendre en considération les impacts sur la santé des agents chimiques, physiques et biologiques présents dans les différents milieux de vie. Parmi eux se trouvent les résidus de médicaments.
(1) L. n° 2011-2012., 29 déc. 2012 relative aux produits de santé
(2) CE, 11 juin 2003, n° 247 736
(3) Ord. N° 2005-1087