Les terres excavées sont des déchets au regard de la législation française et européenne, leur traitement est donc obligatoire pour celui qui les produit . Ce traitement doit viser en priorité à leur réutilisation, et si c’est impossible du fait de leur niveau de pollution comme du fait de contraintes techniques et/ou financières, il faut les éliminer dans le respect de la sécurité des personnes et de l’environnement .

Un des problèmes rencontrés par les producteurs souhaitant faire traiter leurs terres, polluées ou non, est le manque d’infrastructures en France : de ce fait, il est particulièrement intéressant pour les producteurs, a fortiori dans les régions frontalières comme le Nord ou l’Alsace, de les faire traiter à l’étranger, notamment en Belgique et aux Pays-Bas où les infrastructures nécessaires sont plus nombreuses.

Toutefois, le transfert transfrontalier de déchets est une activité qui peut poser des risques importants pour l’environnement, elle est donc justement encadrée en droit français et européen. Le texte de référence en matière de transfert transfrontalier de déchets est le règlement européen n° 1013/2006 , qui prévoit une procédure de notification associant le notifiant, le destinataire, et les autorités compétentes de départ et de destination.

Le respect des formalités pour assurer un transfert licite de ces déchets est d’une grande importance, car la responsabilité du producteur ne s’éteint que lorsqu’il peut justifier que les déchets qu’il a produit ont été régulièrement traités, soit par réutilisation soit par stockage dans l’installation appropriée.

La procédure appropriée pour une notification régulière du transfert de déchets entre deux Etats membres de l’Union européenne sera donc détaillée ci-après.

Première étape : Identifier les terres

Avant toute chose, il faut établir un diagnostic des sols accompagné d’un plan de gestion, ce qui permettra de déterminer le niveau de pollution des terres et leurs caractéristiques géologiques. Les possibilités de réutilisation en dépendent : en effet, passé un certain niveau de pollution, les terres sont des déchets dangereux, et leur réutilisation est impossible sans un traitement préalable . De même, les possibilités de réutilisation hors du site d’excavation dépendent des caractéristiques géologiques et chimiques des terres .

Le règlement européen n° 1013/2006 classe les déchets dans deux listes, une verte pour les déchets non dangereux, et une orange pour les déchets dangereux. Toutes les terres destinées à l’élimination doivent faire l’objet d’une notification . Si les terres sont destinées à la valorisation, les terres polluées sont automatiquement dans la liste orange, et soumises à l’obligation de notification . Pour les terres non polluées, comme elles ne figurent pas explicitement dans la liste, elles sont également concernées par la notification .

Etape 2 : Etablir la notification

Le notifiant (qui est généralement le producteur des déchets) doit adresser dans sa notification à l’autorité compétente (en France, le préfet de région) une série de documents obligatoires : document de notification et document de mouvement, documents et informations complémentaires. L’autorité compétente peut également demander des informations supplémentaires qui devront, le cas échéant, être ajoutées au dossier.

Etape 3 : Signature d’un contrat entre le notifiant et le destinataire

Le règlement oblige tout transfert transfrontalier de déchets à être contractualisé, et impose la présence de certaines clauses : le notifiant doit s’engager à reprendre les déchets en cas de transfert illégal ou inabouti ; le destinataire s’engage à fournir un certificat au notifiant lui assurant l’élimination ou la valorisation du déchet selon des méthodes respectueuses de l’environnement ; la preuve de l’existence du contrat doit être fournie aux autorités compétentes dans la notification.

Etape 4 : Souscription de garanties financières

Une autre obligation du règlement est celle de souscrire des garanties financières (ou d’une assurance équivalente) qui couvre le coût du transport, le coût des opérations de valorisation ou d’élimination, et le coût de stockage des déchets pendant 90 jours. La garantie financière joue, après mise en demeure par le préfet, en cas de transfert illégal ou inabouti. Elle doit être soumise à l’approbation de l’autorité compétente.

Etape 5 : Transmission et réception de la notification par les autorités compétentes

Une fois qu’elle a reçu la notification, l’autorité compétente d’expédition conserve une copie et en adresse une autre à l’autorité de destination. La transmission se fait dans un délai de 3 jours ouvrables, et l’autorité de destination a 30 jours pour délivrer un accusé de réception, sans quoi elle devra fournir une explication motivée.

Etape 6 : Décision des autorités et transfert

Dans un délai de 30 jours après envoi de l’accusé de réception, l’autorité compétente d’expédition consent ou refuse le transfert. Toutes les parties compétentes peuvent poser leurs conditions au transfert, transmises par écrit au notifiant.

Pendant le transfert, le document de mouvement signé par le détenteur accompagne le déchet ; il est complété par le destinataire et tous les autres acteurs éventuels de la chaîne jusqu’à son élimination ou sa valorisation.

Une fois le déchet éliminé ou valorisé, le notifiant est libéré de son obligation. Toutefois, un transfert illégal ou non mené à son terme peut engager la responsabilité administrative du notifiant, qui devra supporter les coûts de reprise ou de traitement des déchets. Des sanctions pénales s’y ajoutent, avec des amendes au titre d’infractions à la législation sur les déchets, sur le transfert des déchets, et sur les installations classées, qui peuvent tout à fait se cumuler.

Faire gérer ses terres excavées, polluées ou non, à l’étranger, est donc une solution intéressante, mais qui nécessite de faire preuve d’une grande rigueur dans le suivi de la procédure administrative comme dans la conclusion des contrats.