La loi de 1978, tout comme l’article L.124-4 du Code de l’environnement, prévoient que la protection du secret industriel et commercial est l’une des limites au droit à l’information.

Pour les entreprises, il est vital que ce secret soit préservé, notamment au regard de leur compétitivité. C’est pourquoi il existe de nombreuses dispositions permettant à l’exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement de demander à l’administration de ne pas communiquer certaines pièces d’un dossier soumis à consultation publique ou encore de rayer les mentions du document pouvant porter atteinte à ce secret. Malgré ces solutions visant à concilier droit à l’information et protection du secret industriel et commercial, ce dernier constitue une restriction importante à la pleine effectivité du droit à l’information environnementale.

En effet, la protection du secret industriel et commercial représente un obstacle majeur car il n’en existe pas de réelle définition. Dans l’une de ses définitions, ce secret couvrirait le « secret des procédés », le « secret des informations économiques et financières », et le « secret des stratégies commerciales » (CADA, avis et conseils, Notion-clé concernant le secret en matière commerciale et industrielle (visible grâce au site http://www.cada.fr/les-documents-couverts-par-le-secret-en-matiere,6069.html)). Du fait de ce large champ d’application, de nombreuses informations sont susceptibles d’être concernées par cette définition. Il est donc très difficile pour le demandeur d’une information environnementale d’identifier ce qui relève de ce secret et ce qui n’en relève pas. Il en résulte donc un sentiment d’insécurité juridique, le demandeur ne pouvant prévoir si sa demande se verra ou non opposer un refus fondé sur ce motif.


De plus, la protection du secret industriel et commercial au détriment de l’information environnementale est critiquable d’un point de vue éthique. En effet, il est acquis que la protection de l’environnement est d’intérêt général. Elle est de ce fait un motif supérieur au secret industriel et commercial qui ne vise que la protection d’intérêts privés, à savoir ceux de la société concernée. Dans cette volonté de faire prévaloir l’information environnementale sur la protection du secret industriel et commercial, certains auteurs ont proposé d’exclure du champ d’application de ce secret « tout ce qui concerne les études et informations relatives à la santé et l’environnement. Ainsi, l’amont et l’aval du secret de fabrication pourraient être rendus publics dans la mesure où ces informations permettent de mesurer l’impact sur l’environnement et la santé » (Corinne Lepage, « Rapport de la mission Lepage sur la gouvernance écologique » remis au ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables le 4 février 2008 p.13). Si cette proposition paraît alléchante au regard de la primauté du droit à l’information, il n’en reste pas moins qu’elle est dangereuse, un concurrent d’une entreprise pouvant, sous couvert de demander une information environnementale, avoir accès à des informations menaçant le secret industriel et commercial.

Un auteur écrivait « c’est un truisme que d’affirmer qu’il est difficile de concilier la notion de transparence avec l’impératif de secret des affaires » (Catherine Malecki, « Informations sociales et environnementales : de nouvelles responsabilités pour les sociétés cotées ? », Recueil Dalloz, 2003, p. 818). Cette phrase trouve une résonnance particulière en matière de secret industriel et commercial et d’information environnementale. En effet, si ce secret peut empêcher la communication d’une telle information, il est également possible que la communication d’une information environnementale vienne heurter, dans certains cas, le secret des affaires.

Cependant, une catégorie d’information environnementale ne peut pas se voir opposer ce secret. Il s’agit des informations relatives à l’émission de substances dans l’environnement.
En effet, pour ces informations, l’article L.124-5 II du Code de l’environnement prévoit que « l’autorité publique ne peut rejeter la demande d’une information relative à des émissions de substances dans l’environnement que dans le cas où sa consultation ou sa communication porte atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, au déroulement des procédures juridictionnelles ou à la recherche d’infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales, à des droits de propriété intellectuelle ». La notion d’« émissions de substances dans l’environnement » est entendue largement par la CADA qui retient que cette notion inclut non seulement les informations sur la nature, la quantité, la composition et le caractère nocif des émissions mais également sur les risques d’émissions ainsi que sur les mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets (CADA, conseil, 5 novembre 2009, Président-directeur général EDF).

Si cette évolution est appréciable, il n’en reste pas moins que le secret industriel et commercial est encore trop souvent invoqué pour s’opposer à une demande d’information relative à l’environnement. Cependant, il est probable que les choses seront amenées à évoluer dans un futur proche, la Cour de Justice de l’Union Européenne ayant fait prévaloir le droit du public à l’information environnementale sur la protection du secret industriel et commercial (CJUE 15 janvier 2013 C-416-10 Krizan et autres : la CJUE retient que la protection du secret industriel et commercial ne peut fonder un refus au public d’accéder à une décision d’urbanisme portant sur l’implantation d’une installation ayant des conséquences importants sur l’environnement).