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Cadre et enjeux du Décret multifluides du 2 mai 2012 pour les entreprises de transport de gaz naturel
Par Sophie RENARD
Juriste Qualite - Securite - Environnement
GDF Suez - GRTgaz
Posté le: 19/08/2013 14:11
La réforme issue du Décret de 2 mai 2012 a apporté de grands changements pour les entreprises de transport du gaz naturel, et les conséquences juridiques sont nombreuses.
Rappel du champ d'application de cette réforme, et des enjeux que celle-çi a impliqué dans le secteur du gaz naturel.
A. La notion de canalisation au cœur de la réforme
Véritable colonne vertébrale du système énergétique gazier, la canalisation de transport correspond à ce que l’on appelle communément les gazoducs. Ce terme générique utilisé dans tous les textes règlementaires liés au transport du gaz, désigne l’ouvrage de transport en lui-même qui se compose d’une ou plusieurs conduites ou sections de conduites soudées les unes aux autres, généralement composées d’acier. Les caractéristiques des ouvrages sont divers, les diamètres oscillant entre 8 centimètres et 1 mètre pour une même pression dans les canalisations. La pression est généralement de 67,7 bars mais elle peut varier entre 25 et 80 bars selon la demande des clients.
Ces ouvrages sont destinés à transporter des produits liquides ou liquéfiés sous pression, et principalement les produits pétroliers, le gaz combustible et l’oxygène à destination de réseaux de distribution, d’autres ouvrages de transport, d’entreprises industrielles ou commerciales, de sites de stockages ou de chargement. La canalisation de transport est à distinguer, tant par sa définition que par son régime juridique de la canalisation de distribution , qui correspond à l’ouvrage situé en bout de chaine destiné à livrer le produit au client final généralement industriel, revendeur. Il s’agit en pratique très souvent des conduites de gaz de ville.
Cependant, la notion de canalisation de transport ne s’entend pas aux seuls tuyaux transportant le produit. Il englobe également les installations annexes qui y sont jointes et contribuent à son fonctionnement comme le précise l’article L.555-1 du Code de l’environnement : « une canalisation de transport comprend une ou plusieurs conduites ou sections de conduites, ainsi que les installations annexes qui contribuent, le cas échéant, à son fonctionnement ».
La notion d’installation annexe est développée aux articles L. 555-1 et L. 555-2 du Code de l’environnement. Elle comprend notamment les stations de compression, les stations de réchauffage, de filtrage, de mélange, d’odorisation ou de détente; les stations de mesurage des quantités transportées ou de contrôle de la qualité du produit ; les vannes en ligne de sectionnement ou de dérivation ; les postes de livraison ou terminal ; tout autre élément susceptible de contenir le produit transporté sous pression et contribuant de façon directe ou indirecte au transport de ce produit ; les installations d’interconnexion avec d’autres canalisations de transport, les conduites directes ou réseaux de distribution.
Ces mêmes articles excluent du champ d’application les canalisations mentionnées aux articles 71-2 et 73 du Code minier, les canalisations de distribution de gaz combustibles , les canalisations et tuyauteries relevant de la loi n° 571 du 28 octobre 1943 relative aux appareils à pression de vapeur et aux appareils à pression de gaz et les sections de canalisation situées à l’intérieur du périmètre d’une ou de plusieurs ICPE reliées à ces dernières à partir du premier organe de sectionnement situé sur la liaison vers ces installations, le cas échéant après les installations annexes d’une canalisation de transport.
B. Le cadre du régime de transport de gaz naturel
Malgré de nombreuses similitudes dans les règles liées à la conception, la construction et à l’exploitation, la spécificité du produit transporté qu’est le gaz naturel conduit à ne se consacrer dans cette étude qu’au transport du gaz.
La révolution commence par l’arrêté du 4 août 2006, suivi de l’ordonnance n° 2010-418 du 27 avril 2010 «harmonisant les dispositions relatives à la sécurité et à la déclaration d'utilité publique des canalisations de transport de gaz, d'hydrocarbures et de produits chimiques ». La révolution pour le secteur du transport du gaz a enfin été achevée par le décret n° 2012-615 du 2 mai 2012 « relatif à la sécurité, l'autorisation et la déclaration d'utilité publique des canalisations de transport de gaz, d'hydrocarbures et de produits chimiques » d'application de l'ordonnance. Ce corpus, codifié au chapitre V du titre V du livre V du Code de l’environnement a conduit à l’abrogation de huit lois et treize décrets pour les ouvrages de transports concernés .
Il est à noter que du fait de son autonomie, ce régime juridique relève d’une police administrative spéciale, tout comme il existe une police spéciale liée au régime des ICPE. D’ailleurs ces deux polices poursuivent un but similaire d’encadrement et de limitation des risques pour les personnes, les biens et l’environnement découlant de l’existence d’un ouvrage potentiellement dangereux pour eux. Cette police spéciale bien qu’autonome, est chapeautée par le ministre en charge de la sécurité des canalisations de transport (Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie), et à l’échelon local par ses autorités administratives déconcentrées : les DREAL.
En résultent en particulier de nouvelles procédures de déclaration d’utilité publique intégrant encore davantage la dimension environnementale, celle de la sécurité industrielle et le dialogue renforcé avec les populations concernées, un nouveau régime de servitudes administratives d'occupation de la propriété privée ou de nouveaux modes d'occupation du domaine public.
Ainsi, pour insérer un ouvrage de transport de gaz, la procédure est désormais celle de la demande d’autorisation.
La simple autorisation de transport de gaz pour la construction et l’exploitation des ouvrages ne préjuge pas d’autres autorisations administratives à obtenir en application d’autres règlementations. Il est donc impératif, avant d’entamer les démarches de demande d’autorisation, d’effectuer une revue des contraintes règlementaires qui émanent du projet de construction de canalisation.
Si la demande d’autorisation pour la construction d’une canalisation ressemble fortement à la demande d’autorisation pour l’exploitation d’une ICPE, c’est belle et bien une réglementation distincte de celle des ICPE.