
La décontamination et l’élimination des appareils contenant du polychlorobiphényle, une nouvelle étape dans la prévention des pollutions
Par Marion ZALOGA
Juriste QSE - Chargee Veille Reglementaire
SNCF - Technicentre Atlantique
Posté le: 13/08/2013 11:50
Le décret n°2013-301 du 10 avril 2013 (JORF n°0086 du 12 avril 2013), entré en vigueur le 13 avril 2013, portant diverses dispositions relatives aux déchets, est venu réviser de nombreuses dispositions réglementaires du Code de l’environnement dans le domaine des déchets et principalement concernant les produits et déchets contenant du PCB (polychlorobiphényle) ou BPC (biphényles polychlorés). Ce décret s’inscrit dans la dynamique de prévention des pollutions, dans laquelle, par exemple, le fluides frigorigène R22 (fréon) a déjà été la proie du Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, tout comme le composé chimique bisphénol A.
Ce décret doit s’analyser également dans la continuité des arrêtés des 10 et 26 février 2003 relatifs à la nomination à la commission consultative pour l’élaboration du plan national de décontamination et d’élimination des appareils contenant des PCB PCT, et de son approbation. Il faut y voir ici, un plan pensé sur le long terme, par étapes de décontamination et d’élimination, étant complété par ce nouveau décret de 2013.
A l’échelle communautaire, il est de considérer que la réglementation française respecte les échéances de la Convention de Stockholm signée le 22 mai 2001, sur les polluants organiques persistants, et entrée en vigueur le 17 mai 2004. Cette convention est en réalité un accord international visant à interdire certains produits polluants, du fait de leur dangerosité sur l’Homme et l’environnement.
Scientifiquement, le polychlorobiphényle est défini comme un produit chimique organique chloré, plus connu en France sous le nom commercial de « pyralènes ». Il est utilisé pour sa grande stabilité thermique et sa caractéristique électrique. En effet, il est notamment utilisé comme isolant électrique (diélectrique) pour les transformateurs ou les condensateurs, ou comme fluide caloporteur pour le transfert de calories dans les installations industrielles diverses. Il est également utilisé pour ses qualités de lubrifiant (dans les turbines ou les pompes) et d’ininflammabilité.
Toutefois, ce produit, issu des années 1930, dont l’usage a été interdit par un arrêté du 8 juillet 1975, et toléré dans certains systèmes clos permettant sa récupération, s’est révélé nocif pour l’environnement et pour l’Homme. Cette interdiction est rappelée par l’article R543-20 du Code de l’environnement qui dispose que la détention des appareils contenant du PCB dont la teneur ou la teneur cumulée est supérieure à 500 ppm (partie par million) en masse est interdite.
Concernant la nocivité de ce produit, ceci est notamment du au fait qu’il est insoluble dans l’eau mais soluble dans la plupart des solvants organiques et dans les huiles végétales, qu’il est ne peut être biodégradable (il est classé à ce titre dangereux pour l’environnement), et qu’il est dégradable à haute température en conduisant à la formation de furanes et de dioxines (toxiques et cancérogènes). En somme, ce produit est toxiques, écotoxique et reprotoxique (y compris à faible dose en tant que perturbateur endocrinien), et fait partie des dix polluants organiques les plus persistants. De plus, cette nocivité ne peut être ignorée du fait que la première source d’exposition aux PCB est d’ordre alimentaire. En effet, 90% de l’exposition aux PCB s’observe à travers des produits d’origine animale (poisson, viande, œufs, produits laitiers), et donc indirectement, à travers l’environnement, entendu largement.
C’est ainsi que le champ d’application de ce décret demeure large. En effet, ce décret vise les producteurs et détenteurs de déchets pollués au PCB, les exploitants d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), les collectivités territoriales, et les services de l’Etat. Il impacte de ce fait un grand nombre d’acteurs, du détenteur d’appareils pollués par des PCB, à la commune, lieu de regroupement de populations.
De plus, ces dispositions visent un certain nombre d’appareils puisqu’à la lecture de l’article R543-19 du Code de l’environnement, il faut comprendre par « est réputé contenir des PCB », « tout appareil qui a contenu des PCB sauf s’il a fait l’objet d’une décontamination suivie d’une remise en service pour une durée minimale de six mois au terme de laquelle il est démontré que le produit contenu dans l’appareil après substitution ne contient pas de PCB selon les modalités prévues à l’article R543-32 ». C’est également à travers cet article qu’il est de considérer tout l’intérêt d’un processus de décontamination ou d’élimination.
a. La décontamination ou l’élimination des appareils contenant des PCB
Il est tout d’abord à noter que ce décret de 2013, n’est que la poursuite du plan d’élimination et de décontamination des appareils pollués à plus de 500 ppm de PCB, initié en 2003. Et ce, pour se conformer à l’article R543-20 2° du Code de l’environnement qui interdit « en outre, la détention d’appareils contenant des PCB ou tout mélange de ces substances dont la teneur ou la teneur cumulée est supérieurs à 500 ppm en masse ».
De même, quand on parle de décontamination partielle, l’objectif est de ramener le taux de pollution de l’appareil à un seuil inférieur à 500 ppm. D’autre part, si la teneur cumulée en substances est ramenée à un seuil inférieur à 50 ppm, il sera alors considéré comme effectivement décontaminé au sens de la réglementation, et plus précisément de la nouvelle codification du Code de l’environnement.
Concernant le décret de 2013, celui-ci met en effet fin au plan d’élimination et de décontamination des appareils contenant des PCB, et modifie de ce fait, les articles R543-17 et R543-51 du Code de l’environnement. Plus précisément il est question d’une nouvelle planification pour les appareils pollués à plus de 50 ppm (et inférieurs à 500 ppm). Cette planification, concernant plus de 500 000 appareils, est organisée jusqu’à 2025 (article R543-21 du Code de l’environnement), en fonction de la date de fabrication des appareils. Cette nouvelle phase introduira à terme l’interdiction de détenir des appareils dont le fluide contient des PCB à plus de 50 ppm. Cette planification se déclinera comme ci suit :
- A partir du 1er janvier 2017 si l’appareil a été fabriqué avant le 1er janvier 1976
- A partir du 1er janvier 2020 si l’appareil a été fabriqué après le 1er janvier 1976 et avant le 1er janvier 1981
- A partir du 1er janvier 2023 si l’appareil a été fabriqué après le 1er janvier 1981.
Pour ce qui est des installations fixes de traitement des PCB, ce décret n°2013-301, est venu abroger l’obligation pour ces derniers d’agrément. Toutefois, les disposition dudit décret, maintiennent jusqu’au 1er juillet 2014, sous certaines conditions, la validité des agréments délivrés aux exploitants d’installations fixes et mobiles de déchets contenant des PCB, aux exploitants d’installations de décontamination et à toute personne réalisant une opération de retrait ou de remplacement des huiles contenants des PCB dans un transformateur. Il peut alors encore est observé un aménagement progressif de cette dynamique de prévention des pollutions.
De plus, il est à noter qu’après l’opération de décontamination ou d’élimination, il sera remis au détenteur de l’appareil un certificat qui préciser « le numéro de série de l’appareil ainsi que le type de traitement réalisé (article R543-37-1 du Code de l’environnement).
b. Dispositions spécifiques pour les détenteurs de plus de 150 appareils (R543-22)
L’article R543-22 du Code de l’environnement a été modifié par ce décret pour venir préciser que les détenteurs possédant plus de 150 appareils dont le fluide contient des PCB pourront demander à organiser la décontamination ou l’élimination de leurs appareils selon un échéancier différent de l’article R543-21. Il s’agira alors d’un « plan particulier » consistant à proposer des conditions de détention dérogatoires à l’article R543-31 du Code de l’environnement disposant que toute condition de détention est prévue par voie d’arrêté. Toutefois, cet aménagement pour les détenteurs de plus de 150 appareils doit être la contrepartie d’engagements de la part de ces derniers. En effet, ils doivent garantir la décontamination a minima de la moitié de leurs appareils avant le 1er janvier 2020 et de l’ensemble de leurs appareils avant fin 2025. Pour cela, ils devront présenter un calendrier prévisionnel au ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie avant le 1er janvier 2014. Une fois cette présentation effectuée, il reviendra au ministre chargé de l’environnement de l’approuver, ou non, par arrêté.
Il est à noter que « pour l’application de la présente section [modifiée par l’arrêté du 10 avril 2013], l’autorité titulaire du pouvoir de police est le préfet » (article R543-18 du Code l’environnement).