La politique d’aménagement et de protection de la montagne est apparue dans les années 1960 avec l’essor des sports d’hiver et la création de la Commission interministérielle pour l’aménagement touristique de la montagne (CIATM), remplacée ensuite par le Service d’Etude et d’aménagement touristique de la montagne (SEATM). Sa mission est d’étudier les conditions générales du développement touristique en montagne, dans le cadre de la préparation du plan d’équipement touristique et, de coordonner les actions entreprises pour l’aménagement des stations de sports d’hiver.

La construction des stations de ski actuelles a été lancée en 1964 avec le Plan Neige. Puis, en 1977, le président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, dans son discours de Vallouise, annonce les principes fondamentaux de la politique de la montagne qu’il décrit comme « vivante, active et protégée ». Il proclame le caractère spécifique du milieu montagnard : « Le caractère particulier de la montagne doit être pris en considération. En montagne, plus qu’ailleurs, les situations varient largement d’une vallée à une autre et même d’un versant à un autre. Il faut donc savoir adapter les équipements, les services et les actions administratives à la réalité géographique et humaine. On doit, en quelque sorte, dans la montagne, faire du sur mesure, et non pas appliquer aveuglément un règlement ou une norme nationale. »

La protection de la montagne est inscrite dans la loi (I) et doit être conciliée avec le développement du tourisme, encadré notamment par la procédure de création des unités touristiques nouvelles (II).



I. La protection légale du milieu naturel montagnard, la « loi Montagne »


La loi Montagne n°85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne a dynamisé le développement des territoires de montagne. Dans son article Ier, elle proclame solennellement que « la République française reconnaît la montagne comme un ensemble de territoires dont le développement équitable et durable constitue un objectif d'intérêt national en raison de leur rôle économique, social, environnemental, paysager, sanitaire et culturel », consacrant le développement durable de la montagne comme un enjeu majeur pour le gouvernement. Le développement équitable et durable de la montagne s'entend comme une dynamique de progrès initiée, portée et maîtrisée par les populations de montagne et appuyée par la collectivité nationale, qui doit permettre à ces territoires d'accéder à des niveaux et conditions de vie comparables à ceux des autres régions et offrir à la société des services, produits, espaces, ressources naturelles de haute qualité. Elle doit permettre également à la société montagnarde d'évoluer sans rupture brutale avec son passé et ses traditions en conservant et en renouvelant sa culture et son identité. L'Etat et les collectivités publiques apportent leur concours aux populations de montagne pour mettre en œuvre ce processus de développement équitable et durable en encourageant notamment les évolutions suivantes : faciliter l'exercice de nouvelles responsabilités par les collectivités et les organisations montagnardes dans la définition et la mise en œuvre de la politique de la montagne et des politiques de massifs ; engager l'économie de la montagne dans des politiques de qualité, de maîtrise de filière, de développement de la valeur ajoutée et rechercher toutes les possibilités de diversification ; participer à la protection des espaces naturels et des paysages et promouvoir le patrimoine culturel ainsi que la réhabilitation du bâti existant ; assurer une meilleure maîtrise de la gestion et de l'utilisation de l'espace montagnard par les populations et collectivités de montagne ; réévaluer le niveau des services en montagne, assurer leur pérennité et leur proximité par une généralisation de la contractualisation des obligations. Tels sont les principaux objectifs de la loi Montagne.

Celle-ci créée également des institutions spécifiques à la montagne, dont le Conseil national de la montagne, les Comités de massif et le préfet coordinateur de massif. Le Conseil national de la montagne dispose d’un rôle majeur en ce qu’il a pour mission de définir les objectifs et de préciser les actions qu’il juge souhaitables. Présidé par le Premier ministre, cette instance est composée de membres de différents massifs (parlementaires, représentants des collectivités territoriales, socio-professionnels et délégués du monde associatif).

La loi Montagne, modifiée par la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, traduit la volonté du législateur de redonner aux communes la maîtrise de leur aménagement. Elle a également instauré le dispositif du conventionnement codifié à l’article L. 342-1 à 5 du code du tourisme qui dispose que : en zone de montagne, la mise en œuvre des opérations d'aménagement touristique s'effectue sous le contrôle d'une commune, d'un groupement de communes ou d'un syndicat mixte regroupant des collectivités territoriales. Sauf recours à la formule de la régie, cette mise en œuvre s'effectue dans les conditions suivantes:
- Chaque opérateur doit contracter avec la commune ou le groupement de communes ou le syndicat mixte compétent ;
- Chacun des contrats porte sur l'un ou plusieurs des objets constitutifs de l'opération touristique : études, aménagement foncier et immobilier, réalisation et gestion des équipements collectifs, construction et exploitation du réseau de remontées mécaniques, gestion des services publics, animation et promotion.
Ce dispositif permet aux collectivités de montagne de contrôler les opérations d’aménagement touristique entreprises sur leur territoire et les désigne comme « autorités organisatrices » du développement touristique. Cela leur permet de connaître et d’orienter les aménagements touristiques, obligeant l’ensemble des opérateurs concernés par l’opération à s’engager contractuellement sur le respect des termes de la convention.

L’ensemble des règles posées par la loi Montagne participe à la protection des territoires de montagne.


Ces territoires sont très attractifs pour les touristes en raison des beautés naturelles et des loisirs qu’ils offrent. Ainsi, la protection de la montagne doit être conciliée avec le développement du tourisme (II).



II. Le développement du tourisme en montagne, la procédure des « unités touristiques nouvelles »



Si la montagne semble être prise en compte dans sa spécificité et protégée par la législation, elle n’a pourtant pas été intégrée dans le code de l’environnement tel que l’a été le littoral.
L’aménagement du territoire de montagne est finalement largement conditionné par les règles d’urbanisme. L’ensemble des documents d’urbanismes, les schémas de cohérence territoriale (SCOT), le plan local d’urbanisme (PLU) et les cartes communales, déterminent les zones d’aménagements touristiques. Ces instruments permettent également de prendre en compte les spécificités du milieu montagnard, soumis à de forts aléas naturels tels que les avalanches ou les inondations.

Avant la loi Montagne, le caractère spécifique du milieu montagnard évoqué par le président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, dans son discours précité, est pris en compte dès une instruction interministérielle du 4 novembre 1977 relative à l'aménagement des unités touristiques en montagne (UTN). Cette instruction a préfiguré l’adoption du décret n° 77-1281 du 22 novembre 1977 approuvant la directive d'aménagement national relative à la protection et à l'aménagement de la montagne et à une circulaire du 24 août 1979.

Désormais, en vertu de l’article L. 145-9 du code de l’urbanisme, est considérée comme unité touristique nouvelle toute opération de développement touristique, en zone de montagne, ayant pour objet ou pour effet, en une ou plusieurs tranches:

- Soit de construire des surfaces destinées à l'hébergement touristique ou de créer un équipement touristique comprenant des surfaces de plancher ;

- Soit de créer des remontées mécaniques ;

- Soit de réaliser des aménagements touristiques ne comprenant pas de surfaces de plancher dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat.

Cette procédure d’aménagement spécifique au milieu montagnard matérialise la prise en compte de ses particularités.

Les règles relatives aux unités touristiques nouvelles sont fixées au IV de l'article L. 145-3 et par les articles L. 145-9 à L. 145-13 du code de l'urbanisme ainsi que l’article L. 342-6 du code du tourisme. En vertu de ces articles, le développement touristique et, en particulier, la création d'une unité touristique nouvelle doivent prendre en compte les communautés d'intérêt des collectivités locales concernées et contribuer à l'équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant l'utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative pour les constructions nouvelles. Leur localisation, leur conception et leur réalisation doivent respecter la qualité des sites et les grands équilibres naturels.

Dans les communes qui ne sont pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale (SCOT), la création et l'extension d'unités touristiques nouvelles sont soumises à autorisation. Le projet est préalablement mis à la disposition du public.

L'autorisation est délivrée par le préfet coordonnateur de massif, après avis de la commission spécialisée du comité de massif, lorsqu'elle porte sur des remontées mécaniques qui ont pour effet la création d'un nouveau domaine skiable ou l'extension du domaine skiable existant au-delà d'un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat, ou sur une opération qui présente un intérêt régional ou interrégional en raison de sa surface ou de sa capacité d'accueil.

L'autorisation est délivrée par le représentant de l'Etat dans le département, après avis d'une formation spécialisée de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et des sites, lorsqu'elle porte sur une remontée mécanique ayant pour effet l'extension d'un domaine skiable existant au-delà d'un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat, ou sur une opération qui présente un intérêt local en raison de sa situation, de sa surface ou de sa capacité d'accueil. L'autorisation peut imposer la réalisation de logements destinés aux salariés de la station, notamment aux travailleurs saisonniers, et prévoir des dispositions pour l'accueil et l'accès aux pistes des skieurs non-résidents.

Elle devient caduque si, dans un délai de quatre ans à compter de la notification au bénéficiaire, les équipements et les constructions autorisés n'ont pas été entrepris. En cas de recours, le délai de caducité est suspendu pendant la durée des instances. Pour les opérations autorisées antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi Montagne, la date de notification à prendre en compte pour le calcul du délai de validité de l'autorisation est fixée au 1er janvier 1986. L'autorisation devient également caduque, à l'égard des équipements et constructions qui n'ont pas été engagés, lorsque les travaux d'aménagement ou de construction ont été interrompus pendant un délai supérieur à quatre ans. Ce délai peut être prorogé de quatre ans renouvelables, par délibération du conseil municipal. Ce délai s'applique aux opérations autorisées antérieurement à la date de publication de la loi de 2005 relative au développement des territoires ruraux.

Par ailleurs, les autorisations d'occupation du sol nécessaires à la réalisation de l'une des unités touristiques nouvelles ne peuvent être délivrées que dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme.

En outre, lorsqu'un projet d'unité touristique nouvelle concerne un territoire couvert par un schéma de cohérence territoriale ou un schéma de secteur approuvé et que ce schéma n'en prévoit pas la création, le représentant de l'Etat dans le département peut, à la demande de la commune ou du groupement de communes concerné et après avis de la commission spécialisée du comité de massif, demander la modification du schéma.



Finalement, cette procédure relative lourde semble encadrer strictement le développement touristique dans les territoires de montagne. Mais les associations de l’environnement continuent de dénoncer les impacts de ces infrastructures et de leurs travaux d’aménagement sur l’environnement.